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LEFÉBURE Léon Albert

Homme politique, membre de l’Académie des Sciences morales et politiques, (C) (★ Wintzenheim, Logelbach 31.5.1838 † Orbey 6.8.1911).

Fils de 1. ∞ Paris 3.1.1874 Henriette Froment-Meurice († 1876) ; 1 fils : Eugène. Après un bref séjour au Collège des Jésuites de Fribourg, Suisse, L. fut confié à divers précepteurs, professeurs au Collège de Colmar, dont l’abbé Guthlin, d’orientation libérale, qui exerça sur lui une grande influence. Etudes de droit à Paris, au cours desquelles il se lia au groupe des catholiques libéraux : Cochin, Montalembert, Melun. Au cours des années 1862-1863, il collabora aux efforts de son oncle Antoine Herzog pour exploiter de vastes plantations de coton dans les environs d’Oran, et fut conseiller général d’Oran de 1863 à 1867, au moment où les Herzog abandonnèrent ces projets, contraires à la politique arabe de Napoléon III. Auditeur au Conseil d’Etat (1864), L. fut nommé secrétaire de la commission de l’Enquête agricole pour l’Est, présidée par l’inspecteur général Tisserant. Ils publièrent en 1868 un tiré à part de l’Enquête relative à l’Alsace. Membre actif de la Société d’économie sociale à partir de 1866, il fit connaître à la Société les études de l’abbé Hanauer ©, professeur au Collège de Colmar. L. succéda à son père au Conseil général dès 1867. Il assura cette année-là le secrétariat de Frédéric Le Play, commissaire général de l’Exposition universelle de 1867, et rédigea le rapport du jury spécial « chargé de créer des récompenses en faveur des établissements et des localités qui dans le monde entier donnent les meilleurs exemples de paix sociale ». En 1868, il fut nommé conseiller de Préfecture à Strasbourg : poste d’attente, destiné à lui permettre de se lancer dans la campagne électorale pour le mandat législatif de Colmar, qu’abandonnait son père, mais que les Herzog et les Lefébure ne voulaient pas laisser à Frédéric Hartmann © de Munster. La campagne électorale fut fort vive : le Journal de Colmar fondé par Hartmann, polémiqua vigoureusement avec l’Alsace, rédigée par l’abbé Guthlin. La victoire de L. ne fut pas seulement celle d’un héritier : elle dut autant à son intelligence politique et à son talent oratoire qu’aux pressions de l’administration et du clergé, et les deux candidats disposaient de caisses électorales consistantes. Au Corps législatif, L. reprit la tradition libérale de son père et signa la motion des Cent-Seize – ou Tiers Parti – qui entraîna la chute du ministère Rouher (juillet 1869). L. se plaça au Centre gauche, et soutint l’expérience de l’Empire libéral d’Emile Ollivier. Il se fit remarquer dans le débat sur l’Algérie (8.3.1870), où il se prononça vigoureusement pour la mutabilité du melk, le régime civil et le renforcement de la colonisation, il fit voter pour le oui au plébiscite de mai 1870. Le 16.7.1870, il vota contre la guerre (pour la communication des dépêches). L. participa à la dernière séance du Corps législatif, le 4.9.1870, puis il rejoignit les unités de la Garde mobile du Haut-Rhin regroupées autour de Bussang, où il commanda une compagnie. N’ayant pas réussi à entrer dans Belfort déjà assiégée, les compagnies alsaciennes – dont la sienne – refusèrent de suivre Emile Keller © à Besançon et furent dissoutes. L. séjourna alors à Tours, puis à Bordeaux. Il se présenta le 2.7.1871 aux élections complémentaires de la Seine et fut élu. Il prit place dans le groupe conservateur et libéral de Broglie et Buffet. Il vota pour le renvoi de Thiers, contre l’amendement Wallon, pour les lois constitutionnelles de 1875. Il fut sous-secrétaire d’Etat aux Finances dans le gouvernement de Broglie (27.5.1873- 21.5.1874) et de Cissey (23.5.1874-2.8.1874). L. avait acheté un château dans l’Orne, où il projetait de poursuivre sa carrière politique, mais ce projet n’aboutit pas. Eprouvé par la maladie et le décès de sa femme, L. abandonna la vie politique. Désormais, il partagea sa vie entre Orbey, Paris, La Normandie et la Côte d’Azur. Membre de nombreux conseils d’administration (Les assurances le Soleil, les Chemins de fer de l’Est, vice-président de la Compagnie minière de la Vieille-Montagne, mines de zinc en Belgique et en Suède…, etc.) il continua de participer aux activités de la Société d’économie sociale, et anima de nombreuses associations d’assistance. Rejetant « la seule organisation bureaucratique de la charité légale, et voulant associer à l’assistance officielle de l’Etat l’initiative charitable », il fonda en 1889 l’Office central des œuvres de bienfaisance, qui compta les grands noms du paternalisme social français dans son conseil d’administration : Vogüé, Georges Picot, Cheysson, etc. L’Office publia en 1904 deux grandes enquêtes : Paris charitable et prévoyant, et La France charitable et prévoyante, portant sur l’activité d’assistance non gouvernementale au début du siècle en France. Mais il enquêta aussi sur l’assistance privée dans l’Etat de New-York (par Eugène L., son fils), sur l’assistance-chômage en Grande-Bretagne (de Witt-Guizot), etc. Cette activité lui valut d’être élu membre de l’Académie des sciences morales et politiques en 1903, après un premier échec en 1890. Dans la Renaissance catholique en France, paru en 1886, il avait fait l’histoire du groupe des catholiques libéraux, réunis autour de Montalembert, et prôné la fédération des forces catholiques, face à la République laïque. Il renouvella cet appel en 1896, dans La recherche de l’idéal. En 1905, il publia Portraits de croyants, où sont évoqués les figures de Montalembert, Augustin Cochin, et son maître de Colmar, mort vicaire général d’Orléans, l’abbé Guthlin ©.

Biographie nationale, – Les contemporains, M. Léon Lefébure, Ancien sous-secrétaire d’Etat, Paris, 1876 ; Ingold, Biographies alsaciennes (photographie de Lefébure jeune) ; Léon Lefébure (nécrologie), Cahiers alsaciens, janvier 1912, Mgr Kannengiesser, Un Alsacien, Léon Lefébure, Paris, 1912 ; EA VIII, p. 4683 ; B. Yvert, Dictionnaire des ministres, 1990 ; F. Igersheim, Politique et administration dans le Bas-Rhin, Strasbourg, 1993.

François Igersheim (1994)