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JOACHIM Jules

Professeur et historien, directeur de la Revue d’Alsace, (C) (★ Delle 17.12.1871 † Delle 15.3.1961).

Fils de Louis Joachim, greffier de la justice de paix, et de Julie Monnier. Célibataire. Franc-comtois par son ascendance paternelle, alsacien par sa mère, il était virtuellement enraciné dans cette « Porte de Bourgogne et d’Alsace » dont il n’a cessé d’étudier les heurs et les malheurs. A trois ans, il fut placé à la salle d’asile de Delle, tenue par sœur Monique Fischer, de la Providence de Portieux ; à sept ans, il fut confié aux mains de M. Schlicklin, instituteur de l’école communale, deux éducateurs admirables auxquels il avait voué, sa vie durant, une profonde gratitude. De 1882 à 1889, études secondaires à l’école libre Saint-Benoît, fondée à Delle par les Bénédictins que le Kulturkampf bernois avait chassés de Mariastein. Obtint à Besançon le baccalauréat ès lettres en 1887, ès sciences en 1889. Joachim suivit ensuite des cours au lycée Henri IV à Paris (première supérieure), puis à la Sorbonne. Licence ès lettres (1892). Diplôme d’études supérieures d’histoire et de géographie (1895). En 1896, il fut reçu second à l’agrégation d’histoire. Professeur aux lycées de Châteauroux et de Caen, il fut appelé au lycée de Nancy, où il retrouva Christian Pfister ©, son ancien maître en Sorbonne, recteur de l’Université. Il s’y révéla, sans tarder, la force motrice de la Société d’assistance et de réintégration des Alsaciens-Lorrains, victimes du traité de Francfort. Il connut, en 1914, les servitudes de la guerre. En 1919, Chr. Pfister, chargé de la réorganisation de l’Université de Strasbourg, lui réserva une chaire à la faculté des Lettres. Il déclina l’offre et demanda à être nommé au lycée de Colmar, sa démarche ayant toujours été tournée vers l’enfance et la jeunesse. Homme de cœur, il était d’une extrême générosité, solide dans ses attachements, fidèle à ses sentiments. Ses élèves le lui ont rendu : haut-fonctionnaires, officiers généraux, magistrats, médecins, avocats, bien d’autres lui doivent leur vocation d’enseignant ou d’historien, et ils étaient nombreux à se souvenir affectueusement de lui, fidèles par-delà la mort. C’est à Colmar qu’il put laisser libre cours à sa passion de chercheur, aux Archives départementales ou municipales, à la bibliothèque de la ville où, durant 13 ans, il a étudié jour après jour. Ses vacances, il les avait utilisées pour faire des recherches aux Archives nationales ou dans des dépôts étrangers, Bâle, Porrentruy, Berne, Rome. Dès 1923, il avait accepté des mains de Louis Herbelin ©, en commun avec Camille Oberreiner, la direction de la Revue d’Alsace, « cette grande dame qui fait honneur à l’historiographie alsacienne ».

On réclama sa présence dans toutes les sociétés savantes d’Alsace, de Franche-Comté, du Jura bernois. Il collabora à leurs annuaires, leurs bulletins, leurs mémoires. En 1956, il fut porté à la présidence d’honneur de la Fédération des sociétés d’histoire et d’archéologie d’Alsace, dont il avait demandé la création depuis 1925. Il y voyait « la plus haute récompense pour son activité au service de cette Alsace qu’il avait tant aimée », et pour laquelle il avait travaillé sans relâche jusqu’à son dernier souffle. Son héritage scientifique ? En dehors d’innombrables comptes rendus critiques, notes, documents ou articles de vulgarisation, sa bibliographie ne comprend pas moins de deux cents travaux originaux qui tous ont résisté à la critique la plus sévère. Très tôt, il s’était attelé à une « histoire religieuse dans le Haut-Rhin durant la Révolution française ». La documentation qu’il avait amassée en aurait justifié la publication, mais sa crainte d’un travail hâtif, toujours la lui a fait remettre. Le manuscrit est déposé à la Bibliothèque de Colmar. Sa très riche bibliothèque est allée à la Société belfortaine d’émulation. À deux reprises, ses travaux ont été couronnés par l’Académie des Sciences morales et politiques (1927 et 1935), en 1938 par l’Académie française. Il était officier de l’Instruction publique (1913) et fut fait chevalier de la Légion d’honneur le 3 février 1929.

« Louis Herbelin », Revue d’Alsace, 1923, p. 438-443 ; « Un point de l’histoire de la Revue d’Alsace », Revue d’Alsace, 1932, p. 273-275 ; Cent ans de la Revue d’Alsace, Revue d’Alsace, 1950-1951, p. 7-15. Trois ouvrages : L’École centrale du Haut-Rhin à Colmar, Paris, 1935 ; « La crise religieuse à Belfort pendant la Révolution », Bulletin de la Société belfortaine d’émulation, n°60, 1955-1957, p. 1-199 ; Les Jacobins de Delle. Procès-verbaux, discours et correspondances de la Société Populaire (1791-1794)Introduction d’Y. Baradel, Belfort, 1990. Il légua ses notes et manuscrits à la Société belfortaine d’émulation et à la Bibliothèque municipale de Colmar, notamment son Histoire religieuse dans le Haut-Rhin durant la Révolution française, restée inédite.

P. Schmitt, « Jules Joachim, » Revue d’Alsace, 1960, p. 211-212 ; idem, « Jules Joachim,», L’Écrivain d’Alsace et de Lorraine, n° 3, 1961, p. 1 ; A. Stintzi, « Jules Joachim », Annuaire de la Société d’histoire sundgauvienne, 1961, p. 8-9 ; J. Suratteau, « Jules Joachim », Annales historiques de la Révolution française, 1961, p. 302 ; P. Schmitt, « Jules Joachim », Annuaire de la Société historique et littéraire de Colmar, XII, 1962, p. 106-113 ; idem, « Jules Joachim », Bulletin de la Société belfortaine d’émulation, 1962-1963, p. 23-31, avec bibliographie complète ; P. Kim, La Revue d’Alsace 1834-1974. Une historiographie, mémoire de maîtrise, Strasbourg, 1982 ; idem. « La Revue d’Alsace (1834-1984). Une historiographie », Revue d’Alsace, 1984, p. 5-26 ; Dictionnaire de biographie française, XVIII, 1991, 661-662.

Pierre Schmitt (1992)