Magistrat, (★ Colmar 9.8.1878 † Colmar 11.9.1952. Fils de Jean-Baptiste Fleurent © et frère d’Henri Fleurent ©. ∞ 24.7.1911 à Turckheim Marie-Andrée Schwindenhammer (★ Turckheim 6.6.1888 † Colmar 5.9.1969), fille de Louis Schwindenhammer, industriel à Turckheim, et d’Antoinette Joséphine Eugénie Marie Ichier. Né à Colmar d’une famille bisontine installée en Alsace depuis 1760, Fleurent avait eu, tout enfant, l’exemple d’un attachement fidèle à la France. Son père, maître Jean-Baptiste Fleurent, avocat au Barreau de Colmar, avait quelques mois avant la naissance de son fils renoncé définitivement à plaider devant les tribunaux d’Alsace, ne voulant pas abandonner la langue française. Inscrit lui-même au Barreau de Colmar de 1904 à 1917, Fleurent entra par la suite dans l’administration. Au lendemain de l’Armistice de 1918, il fut un des premiers magistrats alsaciens choisis par le gouvernement pour faire revivre en Alsace recouvrée la justice française. Juge au tribunal de Strasbourg, puis vice-président de cette juridiction, Fleurent ne tarda pas à s’imposer par sa science juridique, son talent de professeur de droit local à l’Université de Strasbourg. En 1931 il a été appelé à présider l’important tribunal de Mulhouse. La guerre le trouva à son poste. Ses opinions qu’il ne cachait pas et qu’il affirmait hautement ne tardèrent pas à le faire destituer par les Allemands. C’est alors qu’avec les Heitz, Bareiss, Weninger, Rey et de nombreux autres compatriotes qui ne voulaient pas admettre le caractère définitif de la défaite de 1940, il collabora à la rédaction du rapport sur la situation en Alsace, qui fut retrouvé dans le train de Toulouse par la Gestapo, découverte qui aboutit à l’arrestation de plusieurs membres du réseau. Nommé le 10 février 1945 premier président à la Cour d’appel de Colmar, il lui appartenait d’accepter la lourde charge de réorganiser, une fois de plus, la Justice dans les départements du Rhin et de la Moselle. Atteint par la limite d’âge, il eut encore la joie de recevoir, avant son départ, la rosette d’officier de la Légion d’honneur. À côté du magistrat, il y avait l’homme de tous les jours: sa bonhomie souriante avec une légère pointe de scepticisme, son dévouement à toutes les grandes causes, à la Croix-Rouge, au Rotary international. Jamais une parole de haine n’est, tombée de ses lèvres ; au contraire, sa bienveillance extrême lui faisait oublier toutes les critiques. Sa mort fut celle d’un chrétien sans reproche, après une vie bien remplie. Il repose maintenant dans ce cimetière de Colmar auprès de son père, unissant ainsi pour l’éternité la résistance de 1870 à celle de 1940 – symbole de cette province qui ne veut pas vivre asservie. Fin lettré, il avait mis très tôt son érudition au service de la cause française en Alsace. Dès 1907, il publia dans la Revue politique et parlementaire un important article sur «L’idée de patrie en Alsace». Au cours de l’entre-deux-guerres, il donna à Strasbourg, au sein de l’Association des juristes d’Alsace et de Lorraine, des conférences remarquées, notamment sur «L’esprit national dans les législations française et allemande». En 1950, il accepta le poste de président de la Société historique et littéraire de Colmar, où il collabora à deux annuaires successifs par ses anecdotes sur les magistrats d’autrefois. Officier de la Légion d’honneur.
Archives municipales de Colmar, EC et dossiers familles; Le Nouveau Rhin français du 12.3.1952 «Nécrologie»; «Décès de M. Joseph Fleurent, premier président honoraire de la Cour d’Appel de Colmar», Revue juridique d’Alsace et de Lorraine, V, 33, 1952, p.199; P. Grimai, «Allocution à la mémoire du premier président Fleurent…», Cour d’appel de Colmar, audience solennelle de rentrée, 2 octobre 1952, p.39-48; L. Kubler, «In memoriam Joseph Fleurent», Annuaire de la Société historique et littéraire de Colmar, 1953, p.145-146; Himly, Chronologie de la Basse Alsace, Strasbourg, 1972, p.346; Encyclopédie de l’Alsace, V, 1983, p.3010.
Robert Mischlich (1988)