Première supérieure générale des Sœurs de la Divine Providence dites de Ribeauvillé (★ Molsheim, Bas-Rhin, 2.7.1764 † Ribeauvillé 7.12.1824). Fille de Joseph Felber, et de Jacobée Riesenhauser. Elle s’affilia le 17 mai 1787 à l’Association des maîtresses de classe fondée en 1783 par l’abbé Louis Kremp © et Madeleine Ehrhard à Molsheim. Elle fut envoyée faire classe à Andlau. Son refus de prêter le serment constitutionnel lui fit risquer la guillotine avec sa consœur. Elle réussit à s’enfuir en Suisse, où elle resta durant 18 mois. Après la chute de Robespierre en 1794, elle revint en Alsace et rencontra sans doute Kremp à Molsheim. Il avait alors déposé à l’évêché de Strasbourg, son Projet de vie pour les Pauvres Sœurs de la Providence du Diocèse de Strasbourg. Il a dû confier un deuxième exemplaire à Sœur Françoise, celui peut-être qu’il avait remis à la fondatrice, Madeleine Ehrhard, qui mourut le 19 février 1794. Elle l’emporta dans son nouvel exil à Renchen, en Bade, où elle ouvrit une école. Deux documents d’archives de la ville parlent de « la sœur » sans citer son nom, en hiver 1795. Une petite notice des archives du couvent de Ribeauvillé précise qu’elle aurait aussi ouvert une école à Triberg. Il semble cependant qu’elle fut encore ou de nouveau à Renchen en 1800 (puisqu’elle a donné au Projet de vie une couverture fabriquée avec une grande page de cahier de calligraphie d’une élève, qui date son travail: 1er mars 1800. C’est ce qui fit appeler abusivement le Projet de «1800»). Au courant de cette année, elle revint effectivement en Alsace. Elle ouvrit une école à Bindernheim et se rendit ensuite à celle de Sélestat, puis de Dambach. Le 30 juillet 1807 eut lieu au presbytère de Bindernheim, devenue la paroisse du curé Louis Kremp, la première élection d’une supérieure générale. Ce vote était exigé par les statuts imposés par Napoléon qui, le 10 mars 1807, avait autorisé définitivement l’Association de la Providence de Strasbourg promue ainsi: Association religieuse autorisée. Mère Françoise revint à l’école de Sélestat et en fit l’obligatoire maison-mère provisoire et le noviciat avec l’aide de l’abbé Munschina. Elle nomma son premier conseil et la première maîtresse des novices et présida, avec l’abbé Kremp, au renouvellement du serment de fidélité à l’Association des premières dames entrées avant la Révolution, des 16 nouveaux membres reçus entre 1800 et 1808. Avec le fondateur, elle signa, entre 1808 et 1812, toutes les promesses de fidélité et à partir de 1812, les formules de vœux exigés par Napoléon. Par le même décret de 1809, la supérieure générale – Mère Felber en l’occurence – devait gouverner à elle seule l’Association, sous le contrôle du pouvoir civil. Le délégué épiscopal – le fondateur Kremp- était éliminé pour toute affaire temporelle et n’avait plus qu’un rôle spirituel. Toute l’organisation scolaire, l’engagement des candidates, leur formation religieuse et professionnelle, leur nomination aux écoles, leur inspection, revint à la supérieure générale. Mais les sœurs pouvaient recourir au Conseil d’État et le pouvoir civil pouvait intervenir conformément aux articles 6, 7 et11 des statuts de 1812. C’est dans ces conditions extrêmement difficiles que Françoise Felber avec la virilité d’un homme, une prudence exquise et la tendresse d’une mère dut et sut conduire l’Association jusqu’en 1814, où la chute de Napoléon remit en vigueur les statuts d’avant 1809. L’abbé Munschina avait été un précieux collaborateur dans l’organisation scolaire et les relations bénéfiques avec le préfet Lezay-Marnésia © et l’ancien pasteur Cuvier ©, sous-préfet de Sélestat, tous deux très favorables à l’Association. Il mourut cependant en 1813, la même année que le protecteur Lezay-Marnésia. Mère Felber dut mener seule la barque dans les pires difficultés politiques de l’invasion de l’Alsace, surtout de Sélestat, par les Alliés, après la défaite de Napoléon. En 1814, l’abbé Kremp vint rejoindre la communauté de la mère-école à Sélestat. Épuisé, malade, il n’apportait à Mère Felber que sa présence et sa vie spirituelle intense et communicative. À sa mort, en 1817, la maison-mère provisoire de Sélestat était tout autre chose qu’un couvent, la mère générale n’ayant pu suffire à trop de tâches. Elle accueillit comme un sauveur le nouveau directeur général, l’abbé Bruno Mertian. Elle se soumit aux réformes religieuses et communautaires que le vigoureux réformateur imposait aux sœurs, avec une humilité et une disponibilité qui firent l’admiration de ce prêtre. Elle eut à subir les angoisses et les tractations d’un premier schisme provoqué à Colmar par les dissensions entre le curé Maimbourg de Colmar refusant les réformes de l’abbé Mertian. Celui-ci mourut, sa tâche à peine commencée. Mais il avait acquis le couvent des Augustins à Ribeauvillé. Son frère et successeur, l’abbé Ignace Mertian, réalisa avec mère Felber le transfert de la maison-mère de Sélestat à Ribeauvillé. La supérieure générale y reprit sa tâche difficile à côté d’un ascète de spiritualité plutôt jésuite et d’un pédagogue chevronné, qui donna toute sa force et sa grandeur à la congrégation des Sœurs de la Divine Providence de Ribeauvillé. Elle s’effaça devant cet homme exceptionnel et entreprenant. Affligée d’une maladie très douloureuse, elle céda son mandat à une nouvelle élue, mère Caroline Meyer.
Archives de la maison-mère à Ribeauvillé; I. Beuchot, Les origines de la Congrégation des Sœurs de la Providence de Ribeauvillé, Rixheim, 1901 ; J. Gass, Molsheims Priesterkrone während der Revolution, Molsheim, 1925, 63, 111 ; Sr. M. Adrienne Schwach, Louis Kremp 1749-1817, Colmar, 1975, Archives de la maison-mère à Ribeauvillé.
Sr. Lucie Kittel (1988)