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EUTING Julius

Orientaliste, bibliothécaire, (Pl) (★ Stuttgart 11.7.1839 † Strasbourg 2.1.1913).

Études secondaires au Gymnase de Stuttgart et au Séminaire théologique de Blaubeuren. Études de théologie et des langues orientales à l’université de Tübingen (1857). Docteur en philologie (1862). Abandonna la théologie pour poursuivre à Paris, à Londres et à Oxford des études en vue de la carrière de bibliothécaire. Nommé en 1866 Kustos de la Stiftsbibliothek de Tübingen, puis bibliothécaire de la Bibliothèque universitaire de Tübingen. En 1871 il fut nommé bibliothécaire de la Kaiserliche Universitäts und Landesbibliothek de Strasbourg, qu’il dirigea entre 1900 et 1909, année de sa retraite. En 1880 il fut nommé Ordentliche Honorar Professor à la faculté de Philosophie de Strasbourg, il était Geheimer Regierungsrat et enseigna l’hébreu au Gymnase protestant. Il distingua parmi ses élèves le futur rabbin Armand Isaac Bloch © et lui enseigna le phénicien. Euting fut un grand voyageur. En 1867 il descendit le Danube sur une barque en compagnie de deux Anglo-saxons visita la Transsylvanie, Constantinople, Smyrne, Athènes et Venise, en 1868 la Suède et la Norvège, en 1869 la Sicile et la Tunisie (Carthage) dont il ramena une quantité d’estampages qu’il publia après les avoir déchiffrés. En 1870 nouveau voyage en Sicile, à Athènes, Smyrne, Constantinople, Bucarest, Budapest et Vienne. En 1883 il entreprit un long voyage, parcourant le proche Orient durant huit mois. Il fut soutenu par le roi de Wurtemberg et le Statthalter von Manteuffel. Au Caire il obtint des lettres de recommandation pour divers émirs. Il voyageait déguisé en arabe sous le nom d’Abdel Wahab et maîtrisait la langue des pays traversés. Il séjourna durant trois mois à ‘Hayel, auprès de l’émir Mohammed ibn Abdallah ar Rashid. Après son départ de ‘Hayel, il fut attaqué par des Bédouins et, pour se défendre, dut tuer deux assaillants. Son compagnon de voyage, l’orientaliste Charles Huber © qui s’était séparé de lui, fut assassiné près de Djedda. Il ramena de son voyage des centaines d’estampages ou de copies d’inscriptions (900 ?). Il était devenu un spécialiste pour l’araméen, le syriaque, le mandéen, le samaritain, le palmyrénien, le nabatéen, l’hébreu, le phénicien, le punique, l’arabe, le minéen, le sabéen, le liyanéen, l’himyarite, le pehlvi. En 1889 il fit un nouveau voyage en Égypte septentrionale, dans la presqu’île du Sinaï (où il déchiffra le sinaïtique) et en Transjordanie. En 1890 il participa sous la direction de Koldewey aux fouilles de Zindjirli près d’Alexandrette. En 1898 nouveau voyage par Port-Saïd, Jérusalem, Jéricho, Madaba jusqu’à Pétra, voyage dont il rendra compte dans une conférence devant des têtes couronnées en 1901. En Alsace, il consacra une grande partie de son temps à l’épigraphie juive. De nombreuses stèles médiévales à inscriptions hébraïques étaient découvertes lors de la démolition de constructions anciennes à Strasbourg, d’autres lui furent signalées à Colmar, à Rouffach, à Molsheim… Des correspondants lui firent parvenir estampages et photographies. Un grand nombre de ces estampages a été retrouvé en 1982 à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg, quelques-uns inédits. La B.N.U.S. garde la marque de son premier bibliothécaire par sa richesse exceptionnelle en hebraïca. La Eberhard-Karls Universitàts Bibliothek de Tübingen conserve ses carnets de notes et les aquarelles (paysages et personnages) peintes au cours de ses voyages, ainsi qu’une quantité d’estampages, tandis que la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg conserve ses estampages hébraïques, quelques pierres gravées palmyréniennes, ainsi qu’une collection rare de 1.200 estampilles et poids musulmans en verre d’époques omeyyade, fatimide et mamelouk et une trentaine d’amulettes romaines et byzantines. Un indiscret s’étant un jour enquis de l’origine de cette collection (Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg, Cabinet numismatique) s’est entendu répondre ; « Einige hab ich auf der Strass gfunden, einige sind mir gschenkt worde, und der ganzen Rescht hab ich einem arabischen Scheich gstohle ».

Les nombreuses randonnées le dimanche et pendant les vacances, dans les Vosges et aussi en Forêt-Noire, en compagnie de son ami Curt Mündel © (ou même seul) lui permirent de connaître à fond ces deux massifs montagneux. Un des fondateurs du Club Vosgien (1872) il le présida de 1872 à 1914. Le Juliusturm sur le Climont lui fut dédié en hommage. Ses publications sur Strasbourg et les Vosges connurent un grand succès, sa brochure sur Strasbourg fut réédité quinze fois. Mündel lui demanda de collaborer à son Guide des Vosges (Die Vogesen) dont la première édition parut en 1881, suivie, jusqu’en 1911 de 11 autres éditions. Il ne dédaignait pas de jalonner quelque sentier, faisant fi de l’esprit de caste, si cher à l’Allemagne de Guillaume Ier. Il dessina aussi des cartes touristiques. Au physique il était un homme robuste de petite taille, très simple et son manque total de complexes en matière vestimentaire lui donna souvent une allure fort pittoresque. Il avait l’esprit vif et la répartie facile. Sa réplique au prince héritier, le futur empereur Frédéric Guillaume, qui lui demandait en plaisantant s’il avait tué beaucoup de lions, fit les délices des strasbourgeois (« Neen, Keenigliche Hoheit, es ist leider gerade Schonzeit gewesen »). Ce célibataire demeurait au château des Rohan, dans les petits appartements sous les combles, ses fenêtres donnant sur la rue de la Râpe. C’est dans la bibliothèque du château qu’eut lieu la cérémonie funèbre. Selon ses vœux, et avec l’autorisation du roi du Wurtemberg, l’urne contenant ses cendres fut enterrée sur un des sommets de la Forêt-Noire, au Ruhestein, face au Wildsee, dans un merveilleux paysage qu’il affectionnait particulièrement. Par testament l’humoriste qu’il était avait voulu que chaque jour anniversaire de sa naissance, une tasse d’un excellent moka fût servi gratuitement à chaque visiteur de sa tombe dans la toute proche auberge de montagne. La guerre fit que cette disposition ne put être respectée qu’une seule fois. Euting était une de ces fortes personnalités qui impriment un cachet particulier à toutes les entreprises de leur vie privée, comme de leur profession. Il avait accumulé les plus hautes distinctions scientifiques allemandes et étrangères. L’Institut de France l’avait nommé membre correspondant en 1898. Il était membre de l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres et en 1907 il fut admis à l’Académie royale de Prusse, section des sciences.

La bibliographie complète n’ayant jamais paru, elle est donnée ici intégralement.

Publications : A Epigraphie hébraïque et langue judéo-alsacienne ; B Epigraphie en langues sémitiques ou autres ; C Publications touristiques sur Strasbourg, l’Alsace, les Vosges et la Forêt Noire.

Fragment de pierre tombale hébraïque de 1329 trouvé à Strasbourg, Bulletin de la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace, 2e série, 13, 1887-1888, 2e partie, 58 ; Ueber die ältesten hebraïschen Steine im Elsass. Festschrift zur Feier des 350 jährigen Bestehens des protestantischen Gymnasiums zu Strasburg, Strasbourg, 1888 ; Épitaphe de 1213 trouvée à Strasbourg, Bulletin de la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace, 2e série, 15, 1892, 2e partie 6 ; Das Elsässer Judendeutsch ethymologisch berichtigt, Strassburg, 1896 ; Funde in dem Kaufhaus, Bulletin de la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace, 19, 2e livraison, Strasbourg, 1899 ; R. Weyl, Inventaire de la collection d’estampages de Julius Euting, Publications de la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg, 1983.

« Nachrichten über die mandäischen oder zabischen Manuscripten der Kais. Bibliothek zu Paris u. der Bibliothek des Brit. Muséum zu London », Zeitschrift der Deutschen Morgenland Gesellschaft, 1865, 19, 120-136 ; « Punische Steine », St Petersburg, Akad. 1871. Mémoires de l’Académie, VII, Ser t. XVII, n° 3 ; Erläuterung einer zweiter Opferverordnung aus Carthago, Strassburg, 1874 ; Sechs Phönikische Inschriften aus Idalion, Strasbourg, 1875 ; Phönikische Inschriften von Gebal (Byblus) nach einem Papier Abklatsche autographirt, Strasbourg, 1876 ; « Lithographie table of semitic characters », Brickel Gustav : Outlines of hebrew grammar, Leipzig, 1876 ; « Inschriftliche Mitteilungen I Neop. Il Carthago III Stein von Gebal IV Scherschel », Zeitschr. der Morgenl. Gesel., 1875 ; Katalog der Kaiserlichen Universität zu Strassburg. Arabische Literatur, Strassburg, 1877 ; Semitische Schrifttafel entworfert von J. Euting, Strassburg, 1877 ; « Schrifttafel altere semitische Schriftarten », Gesenius Wilhelm : Hebr. Grammatik, Leipzig, 1878 ; Drei Tafeln des Pelevi u. Zend Alphabets, Strassburg, 1878 ; « Phonician inscription from Cyprus », 254 B.C. (Idalion 5), Paläographical Society. Oriental Series, Part VI, Pl. LXXIV, London, 1881 ; Tabula scriptura hebraica, Strassburg, 1882 ; The hebrew alphabet, Strassburg, 1882 ; « Epigraphisches », Zeitschr. der Deutschen Morgenland Gesellschaft, 1883 ; Sammlung der Carthagischen Inschriften, mit Unterstützung der Akademie der Wissenschaft. zu Berlin, Strassburg, 1883 ; Übersicht der aramäischen Ziffern, 1885 ; Nabatäischen Inschriften aus Arabien, Berlin, 1885 ; « Epigraphische Miscellen », I. Reihe, Sitzungsbericht der Akademie zu Berlin, Berlin, 1885 ; Über seine Reise in Inner-Arabien. 1883-1884, Berlin, 1886 ; Notice sur un papyrus égypto-araméen de la Bibliothèque impériale de Strasbourg, Paris, 1903 ; Sinaïtische Inschriften, Berlin, 1891 ; Zwei bilingue Inschriften aus Tamassos, Berlin, 1887, Akad. Sitz ; Tafeln Sinaïtische Inschriften, Strassburg, 1889 ; « Müller David Heinrich. Epigraphische Denkmäler aus Arabien nach Abklatschen u. Copien des Julius Euting. Denkschriften der Kais. Akademie d. Wissenschaften, Band 37, Wien, 1890 ; Tabula scriptura ara- maicae, Argentorati, 1890 ; Sinaïtische Inschriften mit 40 Autogr. Tafeln, Berlin, 1891 ; Tabula scripturae niguricae mongolicae mandschuricae delineata ab Julio Euting, Argentorati, 1891 ; Uebersicht des Pehlevi- Alphabets, Strassburg, 1891 ; Mitteil. aus den orient. Sammlungen des Kais. Museum zu Berlin, Heft IV, Berlin, 1891 ; Zeichnung u. Transcription der Hadad-Stele aus Bojuk-Gerdschin, Berlin, 1893 ; Tagebuch einer Reise in Inner-Arabien, Leiden, 1896 ; « Hebraïsche Inschrift aus Antinoe », Zeitschrift fur ägypt. Sprache, 1896 ; Samaritische Schrifttafel, Strassburg, 1897 ; Uebersicht der Semitischen Schrift, 1898 ; Tafel der Syrischen Schrift, 1898 ; Notice sur un papyrus éegypto-arméen de la bibliothèque impériale de Strasbourg, Acad. des Inscript, et Belles Lettres, Paris, 1903 ; Diwan mandaeischer nach photogr. Aufnahme, Strassburg, 1904 ; « Sur une inscription hébraïque relative à la Synagogue de Tâdif », Compte-rendu de l’Acad. des Inscriptions et Belles Lettres, Paris, 1904 ; « Inschriften aus Syrien, Mesopotamien und Kleinasien. Il Hebraïsche Inschriften », Beiträge zur Assyrio- logie u. semitischen Sprachwissenschaft, 1913 ; Deuxième partie du Journal de Julius Euting, avec une préface de Enno Littmann, Publication posthume, 1914 ; « Reise nach Innerarabien 1883-1884. Aquarelle aus den Skizzenbüchern des orientalisten Julius Euting, nach den Originalen im besitz der Universitätsbibliothek Tübingen », Jahreskalender, 1984, Tübingen ; Préface de E. Kümmerer, Larges extraits des carnets de notes ; Ch. Huber, Journal d’un voyage en Arabie 1883-1884. Paris, 1891 ; L’exemplaire de la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg a passé par les mains d’Euting qui revendique la propriété de certains dessins ou transcriptions d’inscriptions en apposant, au crayon, sa signature.

Der Odilienberg. Aus dem Vogesenführer von Aug. Schricker erweitert mit einer Karte von Julius Euting, Strassburg, 1874 ; Bilder aus dem Elsass, Heidelberg, 1875 ; Routen-Karte für die Strecke zwischen Lützelhausen und dem Donon, Strassburg. 1877 ; Wegkarte n° 2 : Nideck Donon, Mitteilungen des Vogesen Clubs, 1886 ; Weg-Karte von Sand nach Allerheiligen, Strassburg, 1880 ; Beschreibung der Stadt Strassburg und des Münsters, Strassburg, 1881 ; Elsass-Lothr. Landwirtschaft, Austellung. II-18 Sept. 1881, Strassb., 1886 ; Der Vogesenclub und seine Geschichte. Mitteil. des Vogesenclubs n° 13, Strassburg, 1881 ; « Archaeolog. Ausflug ins Dagsburgische », Bulletin de la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace, Strassburg, 1881 ; Description of the City of Strasbourg and of its cathedral, Strassburg, 1882 ; Ein Gelehrter Benediktiner als Turist auf dem Donon (1696), Strassburg, 1882; Guide illustré de la Ville de Strasbourg et de la cathédrale, Strasbourg, 1886 ; Führer durch Strassburg und Ausflug nach der Hohkönigsburg, 1889; « D’Ankunft der Strossburjer Schiff in Paris den 29. April 1836 », Jahrbuch für Geschichte, Sprache u. Literatur, Strassburg, 1904.

« Geheimrat Prof. Dr. Euting », Vossische Zeitung, I. Beilage, n° 261, 8.6.1909 ; « Julius Euting, dem Präsidenten des Vogesen Clubs zu seinem 70. Geburtstage am 11. Juli 1909 », Die Vogesen, n° 14, 1909 (notice biographique avec portrait en buste). Euting. In memoriam Büchlein, zusammengestellt in den Jahren 1919-1960 von Hans Grauer, 168 pages. Articles de journaux, de revues, découpés ou copiés, copie du diplôme de doctorat, photographies, etc. Original à la Eberhart- Karls Universität à Tübingen. (Euting Sammlung) Photographie en format réduit à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg ; Das Reichsland Elsass-Lothringen 1871-1918, Institut der Elsass-Lothringer… Francfort, 1931-1938, t. 3, 1934, p. 35 (portrait), 123, 272, 499, 502 (portrait), 505, 515 ; J.-L. Huck, « Julius Euting », Les Vosges et le Club vosgien, 1972 (centenaire) ; Encyclopédie de l’Alsace, V, 1984, 2886 ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, III, notices biographiques manuscrites et inédites, publ. en multigr. par le Fr. Denis Sibler 1984, p. 35.

Peinture à l’huile de Léon Hornecker (1897) d’Antonie Boubong, dessin d’Adolf von Meckel, nombreuses photographies à divers âges, photographie d’après un médaillon sculpté. Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg section Iconographie.

Robert Weyl (1987)