Skip to main content

DANCKROTZHEIM

(DANGROTZHEIM, DANGKROTZHEIM, DANKROTZHEIM)

Conrad (Cuonrat), Schean (parfois, = (fils de Jean) (von), échevin et poète didactique haguenovien, (C) (★ Haguenau ? vers 1370/72 † Haguenau 4.3.1444).

Très probablement fils de Johann(es) von Dankrotzheim (Dankrazem, Tenkertzheim = Dangolsheim près de Molsheim), edelknecht (damoiseau ou gentilhomme) qui remplit de 1369 à 1370 les fonctions de schultheiss à Haguenau, venu du dehors, mais qui s’y est probablement fixé par la suite. Danckrotzheim apparaît à Haguenau dès 1398 et en 1399, où, avec son frère Johann, il renonça au fief impérial du Ladhof en faveur de Johann von Lampertheim, mari de leur sœur Maximilla. En 1402 – on suppose à l’âge de 30 ans – il fut élu à vie comme l’un des douze échevins de Haguenau qui géraient l’administration de la ville et en défendaient aussi les intérêts au dehors. En 1433 il était le doyen de ce corps, après avoir été stettmeister en 1404. Vivant de ses rentes, il n’était pas maître d’école, comme on l’a longtemps cru, mais très probablement délégué aux affaires scolaires. Sa modestie et sa bonhomie doublées d’un robuste bon sens et d’un don aigu de l’observation, s’accompagnaient d’une piété fervente et d’un vif intérêt pour l’éducation des jeunes et pour l’instruction de ses concitoyens. Habile versificateur, il avait une façon imagée de communiquer son savoir, probablement puisé à l’école des Franciscains de Haguenau, et une aisance de vocabulaire qui font de lui un des plus intéressants poètes alsaciens du Moyen Âge.

On connaît de lui : un poème de 536 vers, intitulé Ein schönes büchlin, darinnen allerley hauβrat… begriffen wirt et composé en 1431 sous forme de vœu de Nouvel An pour un jeune noble allant se marier : il lui détaille par groupes associatifs plusieurs centaines d’objets mobiliers à acquérir, dont les désignations sont une mine encore inexploitée pour la connaissance du vocabulaire allemand, alsacien en particulier, du XVe siècle et font de lui le premier écrit, jusqu’à présent connu, de ce genre ; un poème de 556 vers, intitulé Heilignambuoch, composé en 1435 et destiné à apprendre aux jeunes sous une forme enjouée les noms des saints et la succession de leurs fêtes (à l’exclusion des fêtes mobiles) ; l’auteur l’a agrémenté de remarques météorologiques, de règles paysannes, de prescriptions sanitaires, de conseils pour une conduite ordonnée et un train de vie honnête. Cet écrit connut encore un grand succès dans le premier tiers du XVIe siècle et fut jusqu’à il y a environ douze ans le seul grand ouvrage connu – et pastiché – de Danckrotzheim ; deux poèmes de Meistersinger, de maîtres-chanteurs, sans date : l’un, Der anbeginne, traite en 13 strophes de 24 vers chacune, de la création du monde et de l’histoire de celui-ci jusqu’à la Conception de la Vierge ; cette œuvre, entremêlée de nombreuses phrases latines, combine le savoir de l’auteur sur les théories philosophiques de l’Antiquité avec le récit de la Genèse et la suite de l’histoire sainte ; il débouche sur la louange des arts libéraux et l’expression fervente de la dévotion envers Notre Dame. L’autre poème, XV Hede von der messe, veut expliquer en 15 strophes de 18 vers chacune, aux laïques ignorant le latin la liturgie et le sens profond de la messe, ses parties successives et les paroles latines introduisant chacune d’elles ; c’est une œuvre originale de catéchèse de la fin du moyen âge alsacien.

Bibliographie de ses écrits : le Hausrat-büchlin n’est connu que par l’exemplaire unique d’une impression de 1531, découverte par le soussigné dans une collection privée et signalée par lui à Joseph Benzing, qui l’a identifiée comme une impression de Joh. Setzer © dans sa Bibliographie haguenovienne, Baden-Baden, 1973, p. 92, n° 1 55 ; l’édition, avec fac-similé et commentaire, préparée par Hellmuth Rosenfeld n’a pas encore paru. – Le Heilig nambuch a été imprimé 3 fois au XVIe siècle : Bâle, env. 1520 et 1528, Strasbourg, 1530 ; un ms. strasbourgeois brûlé en 1870, a été reproduit par A. W. Strobel, Beiträge zur deutschen Literatur und Literärgeschichte, Paris, Strasbourg, 1827, p. 107-129 ; voir l’édition moderne de Karl Pickel, Das Heilig Namenbuch von Konrad Danckrotzheim, Strassburg, 1878. Anbeginn conservé en ms. à Munich, Staatsbibl., cgm. 4997, f° 74 r° -76 r°, a été publié par Thomas Cramer, Die kleineren Liederdichter des 14. und 15. Jahrhunderts, Bd. I, München, 1977, p. 122-130 + 441-442 ; fac-similé de la 1ere strophe avec la notation musicale : Die Colmarer Liederhandschrift. Faksimile-Ausgabe ihrer Melodien von Friedrich Gennrich, Langen bei Frankfurt, 1967, p. 85.- Von der messe conservé en ms. ibid., cgm. 4997, f° 606 r°-608 v° et cgm. 51 98, f° 19 r°-20 r°, publ. par Th. Cramer, op. cit., p. 132-151 + 442-443.

La bibliographie ancienne est périmée et citée dans A. Hanauer, « Conrad Dankrotzheim et le Heilig Namenbuch », Revue catholique de l’Alsace, 15 (1896), p. 440-461 (le tirage à part, Strasbourg, 1896, comporte le texte d’un document de 1436 en plus) ; Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. I, 1909, p. 339 ; Neue Deutsche Biographie III, 1957, p. 509 ; Dictionnaire de biographie française X, 1965, p. 79 ; H. Rosenfeld, « Dangkrotzheim, Konrad », Die deutsche Literatur des Mittelalters. Verfasserlexikon, 2e éd., t. 2, livr. 1/2 (1978), col. 39-42 ; du même, « Der Hagenauer Dichter Konrad Dangkrotzheim (1372-1444) in neuer Sicht : ein adliger Schöffe als Volksdichter und Meistersinger », Recherches Germaniques, 8, (1978), p. 129-142 ; R. Matzen, « Dangkrotzheim », Encyclopédie de l’Alsace, t. IV, 1983, p. 2234-2235 (ces trois derniers articles avec bibliographie complémentaire).

Jean Rott (1986)