Skip to main content

CROY Gustave Maximilien Juste, prince de

Evêque de Strasbourg (1820-1823) (★ au château de l’Ermitage, près de Vieux-Condé, dans le Nord de la France, 12.9.1773 † Rouen 1.1.1844).

Affilié au diocèse de Strasbourg en 1789 comme chanoine du Grand Chapitre noble, réfugié sous la Révolution à Vienne où il occupa l’un des quatre bénéfices de la fondation Lichtenstein après la dissolution du Chapitre d’Offenbourg, il rentra en France en 1817. Le 8 août de la même année il fut nommé évêque de Strasbourg. Préconisé le 23.8.1819, sacré le 9.1.1820 en l’église Saint-Sulpice de Paris, il prit possession du siège épiscopal le 20 mai 1820, après une «vacance du siège» qui avait duré sept ans. C’était un peu pour l’Alsace une résurrection de l’Ancien Régime. Le prince de Croy incarnait « l’épiscopat des grands seigneurs » de la Restauration. Le palais Rohan, où il s’installa convenait bien à ce « prince », à cette « altesse », comme l’appelait le clergé. Très pieux, au témoignage de ses contemporains, il passait aussi pour très orthodoxe, très romain. En même temps, il était très attaché aux Bourbons. Dans ses lettres pastorales le trône était associé à l’autel. Le prélat se félicitait de ce qu’Alsace soit si attachée « à la religion de ses pères » et si dévouée « pour son roi » ; il souhaitait que ses fidèles soient heureux par l’amour « de notre Dieu, de notre roi » et leur demandait qu’ils soient prêts à verser leur sang « pour Dieu, pour le roi ». Dès le mois de juin de 1820, il partit en tournée de confirmation à travers le diocèse ; sa simplicité et son affabilité lui conquirent tous les cœurs. Sa connaissance de la langue allemande lui facilitait les contacts avec la population. Le nouvel évêque avait confirmé Antoine Gérard et Thiébaut Lienhart, supérieur du Séminaire, dans leurs fonctions de vicaires-généraux. Quant à Jean Vion, jusque-là aussi vicaire-général, il fut nommé vicaire-général honoraire, mais resta archiprêtre de la Cathédrale. Nommé Grand-Aumônier de France en octobre 1821 et pair de France en 1822, de C. sera souvent absent de Strasbourg ; Lienhart, son homme de confiance, jouera alors un rôle prééminent dans le diocèse. Le Prince de C. réorganisa les chapitres ruraux de l’Ancien Régime (circonscriptions regroupant de deux à quatre cantons), réforme qui fut achevée par son successeur Tharin, mais qui ne connut pas de lendemain. Il fit rééditer le rituel diocésain, qui parut ainsi sur son successeur. Il fit publier un nouveau propre du diocèse pour le missel et le bréviaire ; les chorales reçurent un manuel. Il était préoccupé par le recrutement sacerdotal. Son influence à la Cour lui permit d’obtenir que les bâtiments du Séminaire, qui abritaient plusieurs écoles et facultés, fussent rendus à leur destination primitive en 1823 ; à la rentrée de 1824 le Séminaire comptait déjà 220 élèves. En 1823 encore, il put obtenir la restitution au culte de l’église Saint-Etienne ; quant aux bâtiments de l’ancienne abbaye Saint-Etienne, qui avaient servi de grenier puis de théâtre depuis la Révolution, il les prit en location pour son petit-séminaire, en attendant que le diocèse pût les acheter. Il introduisit comme manuel de base pour la théologie au grand-séminaire les Institutiones Theologiae Dogmaticae, en trois volumes, publiées par Lienhart en 1821 ; elles y seront en usage jusqu’en 1830. Le prélat n’eut pas plus de succès que les vicaires- capitulaires durant la vacance du siège pour obtenir la rétractation du serment à la Constitution civile du clergé de quelques « endurcis » qui s’y refusaient dans le Haut-Rhin. Il essaya de dédommager les victimes de Saurine en obtenant un canonicat pour Jaeglé, ancien curé de la Cathédrale, et une pension pour de Boug, ancien vicaire général. En tant que Grand-Aumônier il proposa à Liebermann, ancien curé d’Ernolsheim et supérieur du Séminaire de Mayence, le siège épiscopal de Metz, mais celui-ci le refusa, argumentant de son âge avancé et de la connaissance imparfaite de la langue française. Liebermann reviendra alors à Strasbourg et de C. recommandera à son successeur de le prendre comme vicaire-général. Le pasteur autorisa les Rédemptoristes à s’installer au Bischenberg. Il invita les Jésuites à venir prêcher en Alsace ; à sa demande, Mac Carthy, prédicateur attitré de toutes les œuvres de la Congrégation, y prêcha les Carêmes de 1821 et 1822. Il seconda de toute son autorité les missions intérieures et fut favorable à la restauration par Mühe des dévotions et des confréries d’avant la Révolution. Le 4. 7. 1823, le Prince de C. fut nommé au siège archiépiscopal de Rouen, où il sera créé cardinal en 1825. Il eut pour successeur à Strasbourg Claude Marie Paul Tharin.

 

Lettres Pastorales et Mandements du Prince de Croy (1820-1823) (à l’évêché et au grand-séminaire de Strasbourg). A. M. Burg, Histoire de l’Eglise d’Alsace, Colmar, 1946; L. Gloeckler, Geschichte des Bistums Strassburg, 2 vol., Strasbourg, 1879; F. Reibel, Die Bischöfe von Strassburg seit 1802, Strasbourg, 1958; P. Leuilliot, L’Alsace au début du XIXe siècle, t. 3, Paris 1959-1960; R. Epp, Le mouvement ultramontain dans l’Eglise catholique en Alsace au XIXe siècle (1802-1870), 2 vol., Lille-Paris, 1975; R. Epp, Une résurrection de l’Ancien Régime in « Histoire du diocèse de Strasbourg », sous la direction de F. Rapp, Paris, 1982, p. 129-201; X. Ohresser, Les premiers évêques de Strasbourg au début du XIXe siècle, in « Rapport Annuel du Collège Episcopal Saint-Etienne Strasbourg », 1967-1968, p. 30-40; Bibliographie du clergé contemporain par un solitaire, VI, livre 68, 1842, p. 253-288; Biographie universelle, IX, 1855, p. 533-534; Nouvelle biographie générale, 11, 1866, col. 552; L’épiscopat français depuis le Concordat jusqu’à la Séparation (1802-1905), 1907, p. 540-542, 605; Dictionnaire d’Histoire et de Géographie ecclésiastique, 13, col. 1074-1075 (par T. de Morembert).

René Epp