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BONNIN Jean

Professeur d’université (★ Courbevoie 16.7.1939).

Marié, trois enfants. Élève à l’École normale supérieure de 1961 à 1966; doctorat d’État en 1978 (Paris VII) portant sur l’étude géodynamique de la ligne Açores-Gibraltar. Assistant à la faculté des Sciences de Montpellier de 1966 à 1968. Visiting Research Associate au Lamont-Doherty Geological Observatory (LOGO, Etats-Unis) en 1968-1969. Collaborateur scientifique au Centre océanologique de Bretagne à Brest de 1969 à 1973. Chargé de mission auprès du directeur de l’Institut national d’astronomie et de géophysique (INAG) à Paris de 1973 à 1979.

Professeur à l’Institut de physique du globe de Strasbourg (Université Louis Pasteur) à partir de 1979. Les premières recherches de Jean Bonnin à Montpellier ont porté sur la sismologie expérimentale: mise en évidence d’un accident majeur affectant la base de la croûte terrestre au Nord des Pyrénées. Cet accident a été ultérieurement confirmé et interprété comme associé à la limite des plaques Ibérie et Europe Occidentale. La faille nord-pyrénéenne, bien connue des géologues, apparaît comme l’expression superficielle plus ou moins perturbée de cette limite de plaques.

Au cours de son séjour aux États-Unis (1968-1969), Jean Bonnin s’est orienté vers la toute jeune « tectonique globale » dont il sera l’un des principaux acteurs en ce qui concerne l’ouverture de l’océan Atlantique. Il y apprend à reconnaître les anomalies magnétiques océaniques et s’attaque à la cartographie magnétique de la mer des Caraïbes. Rentré en France, il a contribué à décrypter l’Atlantique et ses annexes (océan Arctique, mer de Norvège, Golfe de Gascogne, Méditerranée, etc.) en termes de tectonique des plaques, mais avec un point de vue critique qui choisit de mettre en relief les limites de la nouvelle théorie (déformabilité des « plaques rigides », défauts d’assemblage initial des blocs). En collaboration avec Xavier Le Pichon et Jean Francheteau, il a écrit le premier livre qui décrit en détail le modèle de la tectonique des plaques. Sa charge de mission au
siège de l’INAG (CNRS) a considérablement ralenti son activité scientifique personnelle.
Dans cette position Jean Bonnin a beaucoup œuvré pour un dialogue entre géophysique interne, très marquée alors par la tectonique des plaques naissante, et géologie. À Strasbourg en 1979, Jean Bonnin a tenté, au sein de l’équipe de géodynamique qu’il a initiée, de reprendre la question de la déformabilité des plaques «rigides» sous l’angle rhéologie de la lithosphère. Jean Bonnin a relancé, au sein de la même équipe, les observations gravimétriques qu’avait développées Robert Lecolazet lequel avait mis en évidence l’excellente qualité du site de Strasbourg pour ces observations ; le rôle principal en ce domaine a été assuré par Jacques Hinderer et Martine Amalvict qui désormais ont disposé d’un gravimètre relatif ultra-sensible « supraconducteur » auquel, est associé un gravimètre absolu transportable. En matière d’enseignement, Jean Bonnin a mis l’accent, outre sur son domaine de compétence naturel, sur la formation de base des ingénieurs géophysiciens en outils mathématiques (théorie du potentiel, fonctions spéciales), et a initié des cours sur les fondements de quelques techniques avancées très utilisées actuellement en géophysique (GPS, interférométrie radar). Poussé par son intérêt pour l’activité sismologique considérée comme un marqueur de la déformation des plaques « rigides » Jean Bonnin s’est orienté vers l’étude de la sismicité dans le domaine euro-méditerranéen. À Strasbourg, le Centre sismologique euro méditerranéen (CSEM), lointain successeur du Bureau central international de sismologie était porté à bout de bras par Élie Peterschmitt ©. Jean Bonnin est devenu le secrétaire général, de 1983 à 1992, date à laquelle le CSEM il a quitté son lieu historique pour s’installer en région parisienne. Sous l’impulsion de Jean Bonnin, le CSEM est devenu un important centre international de données sismologiques pour l’Europe : le centre fournit aux utilisateurs institutionnels et aux organisations sismologiques des pays européens et méditerranéens des déterminations rapides des paramètres à la source des tremblements de terre majeurs. Parallèlement, Jean Bonnin a été très actif au sein de l’accord intergouvememental Eur-OPA Risques Majeurs, mis en place par le Conseil de l’Europe. Son domaine d’activité est vite devenu l’Europe entière. En 1985, Jean Bonnin a démarré, en collaboration avec Alexei D. Gvishiani et Mikhailo Z. Zgurovskyy, des études sur l’application des techniques d’intelligence artificielle aux données sismologiques. Il a lancé et mené à terme de nombreux projets dans ce domaine, en partenariat avec le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), l’Académie des sciences de Russie et les Universités de Kiev et Stanford. Déjà, par son action au CSEM, Jean Bonnin avait contribué à la collaboration scientifique avec les « pays de l’Est »    ; comme secrétaire général du CSEM, il avait même réussi à y faire formellement adhérer l’Union Soviétique. Cette aventure n’a pu rester sans lendemain; le CSEM s’éloignant de Strasbourg, une association à but non lucratif Earth Data Network for Education and Scientific Exchange (EDNES) a été créée en 1993 par Jean Bonnin et ses partenaires privilégiés de l’ancienne Union Soviétique, pour poursuivre la promotion de la coopération mutuelle. Cette association, très active au plan européen (au sens le plus large), a vu ses objectifs s’étendre, sous la pression de la demande, des Sciences de la Terre (son but initial) aux problèmes de développement des nouvelles méthodes d’information et de communication. Dans ce cadre en particulier, Jean B. a été expert international dans de nombreux projets de la Commission européenne et du Conseil de l’Europe. Jean Bonnin a fait (ou contribué à faire) germer ici et là nombre d’écoles de pensée, très peu conformistes, mais souvent fécondes. Ses domaines d’activité qui lui valent une large reconnaissance internationale couvrent les champs qui vont de la tectonique des plaques à la protection du patrimoine culturel contre les tremblements de terre, en passant par les risques majeurs.

Martine Amalvict (2004)