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BOLSNITZER Conrad (alias Boltzensnitzer, Kointz, ou Conrad von Glicksberg)

Entrepreneur des mines des Vosges, bailli impérial de Kaysersberg (★ v. 1470/80 en Saxe† après 1521) ; 1 frère, Hermann.

Considéré par ses contemporains comme un destin exceptionnel, surnommé Conrad le Riche après avoir été Conrad le Pauvre (un sobriquet qui se réfère au soulèvement dit arme Konrad en Wurtemberg), digne d’être élevé à la dignité comtale suivant Georg Agricola, Conrad Bolsnitzer semble avoir commencé sa carrière d’exploitant minier dans les mines de Schneeberg, Saxe, probablement en tant que hutman (porion). En 1512, il était oberhutmann (ingénieur) des mines de la Croix-aux-Mines, sur le versant lorrain des Vosges, et possédait vraisemblablement des intérêts du côté alsacien. Le 20.12.1512, l’empereur Maximilien lui attribua la charge nouvelle de directeur général des mines des Pays antérieurs de l’Autriche (obrister bergmeister inn den vier vordern lannden) aux gages de 100 florins par an. Il fut désormais qualifié de bergherr uff der first, maître des mines sur la crête, du nom de sa résidence habituelle de La Croix où il possédait un manoir appelé la Maison de Kointz, dessiné dans le fameux recueil de Heinrich Gross en 1529.
L’année suivante, les Ribeaupierre firent appel à ses services pour relancer l’exploitation du filon Saint-Guillaume de Fertrupt. Il étendit alors son action dans les vallées voisines, notamment près de Munster où il construisit une fonderie d’argent (1518) et exploita les filons de St Michels et St Niklas Stollen, à Eschbach-Heidenbach, en association avec Reinhart Wyd, son futur successeur à la Croix. En 1520, il obtint en outre l’importante concession minière de Schwabenhausen et Kappel, près de Rottweil, sur le versant oriental de la Forêt Noire. Personnage flamboyant, Bolsnitzer se distingua par son mécénat artistique, faisant restaurer le Saint-Sépulcre de l’église de Kaysersberg en 1514 et en le surmontant d’un vitrail à ses armes, offrant des vitraux du maître verrier fribourgeois Hans Götschmann à l’église des Antonins d’Issenheim, en 1517, ou une chasuble aux Dominicains de Colmar, se posant en bienfaiteur de la confrérie des mineurs de Sewen, etc. En 1517, l’empereur Maximilien lui accorda la prévôté impériale (Reichsvogtei) de Kaysersberg moyennant un capital de 2140 florins, réévalué peu après de 500 florins. Cette fonction prestigieuse répondait à des circonstances nouvelles survenues à la suite de la Guerre des Mines de 1516 lors de laquelle le comte Gangolphe de Geroldseck, encouragé par Maximilien Ier et soutenu par Henry VIII d’Angleterre avait fait irruption dans le duché de Lorraine, à la fois pour assurer la domination des Habsbourg sur le bassin minier et pour réaliser un glacis militaire dans les Vosges, en réponse à la victoire française de Marignan. Fidèle de l’empereur tout en était utile à Antoine de Lorraine, Bolsnitzer incarnait la concorde retrouvée à la suite du traité de Haguenau du 16.11.1516 qui neutralisait le massif pendant dix ans. Il fut en outre très lié à Théodore de Saint-Chamond, abbé de Saint-Antoine en Viennois, principal conseiller du duc et responsable des mines du duché. En tant que Reichsvogt, il fut un représentant attentif de l’autorité impériale en Alsace centrale et réaffirma la protection impériale sur les juifs du secteur. Il fut à l’origine du règlement minier en 83 articles (bergordnung) du 20.5.1517 appliqué dans l’ensemble des pays antérieurs de l’Autriche, et véritable modèle du genre. Pour autant qu’on puisse l’affirmer, B. mourut en 1521, laissant une succession embrouillée – la prévôté impériale étant reprise depuis 1520 par J. Brunner. Il possédait une demeure à Colmar, non loin de l’orfèvre Paul Schongauer ©. Son frère et associé Hermann Bolsnitzer († avant 1542, ∞ Ursula Neugarter, remariée 1542 avec Diebolt Schilter), reçu bourgeois de la ville en 1514 et 1530, était Bergmeister et à son tour en 1526, vendit le manoir de la Croix aux Mines en 1528 à Antoine de Lorraine. Il avait été fortement lié au milieu patricien des débuts de la réforme (Peter Neugarter, Ludwig Hutsch) ; son gendre, Bastian Linck, bailli de Riquewihr, fut à l’origine de la famille noble des Linck von Thurnburg ©. Leur sœur Élisabeth, ∞ Jacob Bader († avant 1535), boulanger, hôtelier à la Clef et conseiller à Colmar, 1524, bourgeois en 1492 et 1523, et l’un des chefs des paysans révoltés.

Archives municipales de Strasbourg, VI 145/14 (1528) ; Archives municipales Colmar, JJ 4 (1542) ; J. Becker, Die Reichsvogtei Kaysersberg, Strasbourg, 1906 ; O. Stoltz, « Zur Geschichte des Bergbaues im Elsaß im 15. und 16. Jahrhundert », Elsass-Lothringisches Jahrbuch, t. 18, 1939, p. 116-171 ; La mine, mode d’emploi, édition et commentaire du recueil d’Heinrich Groff, par Hubert Bari, Paul Benoît, Pierre Fluck et Henri Schoen, Paris, 1992 ; A. Westermann, Entwicklungsprobleme der vorderösterreichischen Montanwirtschaft im 16. Jahrhundert, Heidelberg, 1993 ; G. Bischoff, P. Béguerie, Grünewald, le maître d’Issenheim, Tournai, 1996 ; G. Tubbesing, Vögte, Froner, Silberberge. Herrschaft und Recht des mittelalterlichen Bergbaus in Südschwarzwald, Berlin, 1996 ; P. Fluck, Sainte-Marie-aux-Mines. Les mines du rêve, Soultz, 2000 ; G. Bischoff, article à paraître.

Georges Bischoff (2004)