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BARET Pierre

Imprimeur, fondateur de journal (C) (★ Boulogne-sur-Mer 7.11.1793 † septembre 1867).

Fils de Pierre Baret, marchand, et de Marie Antoinette Duhamel. ∞ 12.6.1820 à Rouffach Marie Marguerite Sartory (★ Rouffach 15.4.1801 † Mulhouse 14.4.1882), fille de Joseph Antoine Sartory, négociant, maire de Rouffach († Rouffach 23.12.1813) et de Marie Claire Jaeglé/Jaeglin. Étudia au lycée impérial à Paris puis fut employé à la sous-préfecture de sa ville natale. En 1812, il partit pour la Russie en qualité de secrétaire du général Gourey, un ami de son père. Baret était à Moscou avec l’armée, lorsque l’on tirait pour lui à la conscription dans son pays. Comme il venait de s’engager quelques jours auparavant dans un régiment de la brigade de son général, auprès duquel il continuait ses fonctions, il ne fut pas astreint à prendre rang dans son corps. Le général Gourey ayant été tué, Baret devint secrétaire du général Jomini, et occupait cette place lorsque cet officier général déserta et passa à l’ennemi. On ne tarda pas à reconnaître l’innocence du jeune Baret qui fut pris comme secrétaire par un autre général attaché à l’état-major du maréchal Ney, et l’accompagna jusqu’en France lors de la retraite de Russie pendant laquelle il fit la connaissance du futur général Cavaignac ©. Pendant cette retraite, Baret eut les pieds gelés. Par après, il fut incorporé comme sous-lieutenant payeur, au 27e régiment de ligne et fit partie de l’armée de la Loire et fut mis à la demi- solde. S’étant rendu à Paris, il y rencontra de Castéja ©, qu’il avait connu à Boulogne, et qui, étant alors préfet du Haut-Rhin, le prit comme son secrétaire particulier. Il conserva ses fonctions jusqu’en 1817 et fut nommé percepteur à Rouffach (il y exerça aussi les fonctions de receveur municipal et des contributions directes). Il démissionna en 1834, changea d’orientation professionnelle, et vint s’établir à Mulhouse comme imprimeur-libraire ; il y fonda le 25.6.1835, avec Alphonse Thinus, titulaire d’un brevet d’imprimeur en lettres à Mulhouse, une imprimerie et un journal à parution hebdomadaire, en langue française, l’Industriel alsacien, Journal de l’Industrie, du Commerce et de l’Agriculture, connu sous le nom d’Industriel alsacien, dont le premier numéro parut le 4.7.1835 et qui avait pour but principal de défendre les intérêts commerciaux des départements de l’est de la France. Dans ce premier numéro, les éditeurs exposèrent la tonalité de leur feuille : elle sera libre de tout patronage et accessible à tous. Dès juillet 1835, Baret et son associé se firent les laudateurs d’une jeune mais influente institution mulhousienne, la Société industrielle, soulignant ses nombreux et utiles travaux en éditant le 11.7.1835 un relevé des publications de la Société industrielle de Mulhouse (SIM) par ordre de matière, contenant les noms des auteurs par ordre alphabétique ainsi que les travaux originaux des divers comités de ladite SIM et quelques avis hautement favorables au nouvel organisme ainsi ceux de Hachette, des présidents des Sociétés industrielles d’Angers et de Nantes ou encore de Ch. Dupin. Dès ses débuts, l’Industriel alsacien tissa des liens qui devinrent privilégiés, avec la SIM ; en août 1835, Baret obtint le droit de consulter les ouvrages et périodiques de la jeune SIM. Dès sa première parution, l’Industriel alsacien publia la « Bourse de Mulhouse », qui rédigée par les courtiers de commerce de la place indiquait les prix des principaux produits en vente dans cette ville, ainsi qu’un « bulletin commercial ». En août 1836, le journal publia le salaire moyen d’ouvriers de différentes classes de l’industrie textile. L’Industriel alsacien défendit l’œuvre des industriels mulhousiens attaqués par L. Levrault, dans l’article intitulé « Esquisses du Haut-Rhin », publié en 1836 par la Revue d’Alsace. Publiant leur feuille depuis juillet 1835, ce ne fut que le 15.1.1836 que les deux associés firent procéder à l’enregistrement d’un acte sous-seing privé daté du 5.1.1836, par lequel ils formèrent une société en nom collectif pour le commerce de l’imprimerie et de la librairie à Mulhouse. Cette association ne dura que jusqu’en août 1837. Baret se retrouva seul à la tête de l’imprimerie et Thinus s’occupa de la librairie. En juin 1837, le comité des Beaux-arts de la Société industrielle de Mulhouse ayant remarqué la très belle qualité des travaux typographiques de la jeune maison Thinus et Baret, qualité comparable aux belles et bonnes éditions parisiennes, lui accorda une médaille de bronze. Thinus et Baret publièrent l’Almanach de Commerce de la Ville de Mulhouse et environs. Baret publia l’Almanach de Mulhouse, dont la sortie était présentée comme une révolution dans le domaine des almanachs, grâce à sa qualité et à son prix modeste. Cet ouvrage était une commande de la SIM qui voulait contribuer, à sa façon, à la propagation de l’instruction populaire. L’ouvrage eut deux éditions, allemande et française. Les lithographies de cet ouvrage provenaient des ateliers Engelmann ©. Baret monta la première presse mécanique qui fonctionna à Mulhouse ; ayant su se faire remarquer par « une netteté et une correction [de l’écriture] auxquelles on n’était guère habitué à Mulhouse », la SIM mécontente des services de son imprimeur (Risler), fit de Baret l’imprimeur de son bulletin en 1841 et le resta jusqu’en 1866. Baret devint conseiller municipal en 1843, dans l’équipe du maire Émile Dollfus © il en fit partie jusqu’en 1852. Il ne fit, par contre, jamais partie des membres de SIM. Baret était très impliqué dans la vie de sa ville d’adoption. Membre de la loge maçonnique de Mulhouse (1835). Baret était conscient de l’importance des transports ferroviaires ou fluviaux pour une région comme l’Alsace: c’est ainsi qu’il se montra très critique envers la Compagnie de l’Est à qui il reprochait une grande inertie dans le problème de l’agrandissement de la gare de Mulhouse (insuffisante pour une ville en pleine croissance) et qui faisait tout afin de conserverson monopole dans l’Est, alors que la concurrence rail/canal devait permettre de diminuer le prix du charbon dont les industriels haut-rhinois avaient tant besoin (1858). Il publia un extrait d’une pétition en faveur du regroupement des compagnies de chemin de fer en une seule compagnie afin de réaliser des économies au niveau du personnel qu’il estimait pléthorique, mais également afin de mettre fin aux incessants changements des tarifs et des règlements des compagnies, ce qui entravait la bonne marche de l’industrie et du commerce. Il publia de nombreux articles favorables à la réalisation du canal de la Sarre (les débuts des travaux du canal houiller de la Sarre remontaient à 1806) ouvrant même un bureau de souscription le 13.5.1858, aux côtés des industriels Schlumberger de Guebwiller, Ch. Kestner ©, de Thann et X. Jourdain ©, d’Altkirch. Il se montra également favorable à la réalisation du canal de Suez (1858). Il signa des articles économiques comme ceux sur le coton (1858, 1859), fit le compte-rendu de la fête du 15 août et du banquet des médaillés de Sainte-Hélène (1858), intervint en faveur de la réorganisation du corps des sapeurs pompiers de Mulhouse (1859). En 1846, l’Industriel alsacien devint un journal politique, Baret versant un cautionnement de 7500 francs. Lors des élections présidentielles de 1848, l’Industriel alsacien se rangea derrière le général Cavaignac, compagnon d’infortune de Baret lors de la retraite de Russie, « un esprit juste et éclairé, un homme de sang-froid et de bon sens » alors que les « folles tentatives de Strasbourg et Boulogne » de Louis Napoléon Bonaparte, n’annonçaient « pas un homme supérieur » et conduiraient « nécessairement [le pays] vers l’inconnu ». Dans sa chronique politique du 21.11.1852, Baret s’éleva contre le socialisme de Victor Hugo et le droit divin du prétendant Henry et plaida pour Napoléon III qui devait « cicatriser les plaies que l’hostilité, la fureur des partis ont faites à la France ». Lors des élections consécutives au changement de 1848, l’Industriel alsacien permit au professeur de chimie Achille Penot © d’exprimer ses idées politiques et sociales. Il défendit aussi, en 1848, l’instituteur J.-A. Davin © qui fut injustement accusé de répandre des idées fâcheuses parmi les ouvriers. L’Industriel alsacien relaya, mais en vain, en août 1850, une pétition en faveur de l’ex-représentant Josué Hofer © condamné par la Haute Cour de justice suite à l’affaire du 13 juin.

En avril 1852, l’hebdomadaire cessa d’être un journal politique et retrouva sa première acti-
vité. À partir du 1.1.1854, le journal parut deux fois puis, la même année, trois fois par
semaine. Le préfet lui accorda la faveur de recevoir, aux côtés de la feuille d’Altkirch, les annonces judiciaires de l’arrondissement d’Altkirch (puis de Mulhouse). Baret fit de son journal l’« organe officiel et naturel de la Chambre de commerce du Haut-Rhin », de la SIM et le représentant attitré du commerce mulhousien. Baret signalait la philanthropie des industriels mulhousiens qui intervenaient afin de lutter contre la misère. En 1860, Baret, fidèle à la dynastie impériale, chercha à convertir son journal en feuille politique. Il obtint l’avis favorable du préfet qui soulignait la qualité rédactionnelle du media et son éventuelle utilité à l’administration. L’autorisation ministérielle tardant à venir Baret sollicita le sénateur baron de Heckeren ©. La démarche aboutit le 24.1.1861. Le décès de son fils provoqua, le 2.4.1864, la dissolution de la société en nom collectif Paul Baret et Fils créée pour l’exploitation de l’imprimerie typographique du père, aux termes d’un acte du 26.4.1861. Le 12.3.1865, l’Industriel alsacien soutint la nécessité du remodelage des circonscriptions des arrondissements de Mulhouse et de Belfort ; les cantons de Cernay, Thann et Saint-Amarin reviendraient à Mulhouse alors que l’on réunirait les cantons de Hirsingue et de Ferrette à Belfort. Affaibli par l’âge, il dut renoncer au poste de secrétaire général de la Chambre de commerce où il avait succédé en 1851 à Charles Dollfus © et céda son établissement. Baret chercha, au début de 1866, dans un premier temps, à transmettre son journal au protestant Auguste Schneegans ©, rédacteur du Courrier du Bas-Rhin. Le ministre de l’Intérieur s’opposa à ce changement. Le 30.9.1866, Baret publia un avis par lequel informa les abonnés de son journal qu’il cédait ce dernier et son imprimerie à L.-L. Bader, ancien directeur de l’École professionelle et professeur d’histoire à l’École des sciences appliquées de Mulhouse, qui avait été agréé par le ministre de l’Intérieur. Le 1.10.1866, Bader devint le propriétaire-gérant-directeur de l’Industriel alsacien. Baret était membre de la loge maçonnique de Mulhouse (1835) et médaillé de Sainte-Hélène. Beau-père de Couchemin ©.

Thinus et Baret éditèrent le Guide du Garde-champêtre, ouvrage rédigé en français et en allemand, par le juge de paix Alexandre Ritter ; Leçons publiques données à Mulhouse, par Achille Penot (1836) ; Notice historique sur la ville de Mulhouse, par Ch. de Lasablière, en 1837. Baret publia seul, en 1838, Der Stadt Mühlhausen Geschichten (…) im Anfange des 17ten. Jahrhunderts geschrieben ; mit einem Plan der Stadt, wie sie im Jahr 1642 war, par Jakob Heinrich Petri et la Phrénologie des gens du monde, leçons publiques données à Mulhouse, d’Achille Penot en 1838 ; le Livret indiquant les noms des rues et les numéros des maisons de la ville de Mulhouse, d’après le plan exécuté en 1843, par Ch. Edmond, géomètre, et Engelmann père et fils, en 1844 et 1846 ; Les Asiles agricoles de la Suisse, comme moyen d’éducation pour les enfants pauvres, remède contre l’envahissement du paupérisme, système de colonisation pour l’Algérie, d’après l’ouvrage allemand de Joh. Conrad Zellweger, Mathieu Risler en 1846 ; le Cours d’Agriculture, de viticulture et de Jardinage, dédié aux élèves de l’Asile-agricole de Cernay (1849) ; Mathieu Risler, père © en 1849 ; Kurzer Bericht über das Wallfahrtsort zu Thierenbach. Mit Anhang einiger frommen Gebete de Spahr, en 1850 ; Recueil de divers usages locaux qui, d’après les dispositions législatives qui s’y réfèrent, ont force de loi, dans le canton de Mulhouse, en 1856, Théodore Dincher, juge de paix à Mulhouse, en 1855 ; L’Église de Saint-Georges de Schlestadt ou Notices historiques et archéologiques sur le Moyen Age, Jean Thiébaut Michel Fritsch © et l’École des sciences appliquées de Mulhouse. Littérature française. Première leçon, par Émile Boissière, en 1856 ; Adolphe Braun ©, L’Alsace photographiée, vers 1858-1859 ; Les Bluets, nouvelle anthologie des Familles et des Écoles par J.-A. Davin, chef d’une école privée mulhousienne et l’abbé Legay, de Thann, en 1859. Question de contribution de patentes, de François Zickel-Koechlin, en 1860 ; Examen impartial des conséquences de la réunion des douanes et des contributions directes et Dangers de l’organisation actuelle, nécessité de la modifier d’E. Du Bois de Jancigny en 1860 ; Mon Collègue Étienne, par Émile Boissière en 1866. Dans les années 1855-1866, il imprima le Bulletin de la Société d’Horticulture de Mulhouse. Baret fut l’auteur du Spécimen des caractères de l’imprimerie typographique de P. Baret, juin 1838, du Petit Manuel du voyageur en Alsace …, en 1843.

L’Industriel Alsacien, n° 1,2, supplément au n° 4 et 5, n° 6, 7, 9 des 4, 11 et 25.7., 1er, 8., 15. et 29.8.1835 ; n° 1, 3, 5, 6, 8, 12, 14, 15, 17, 18, supplément au n° 18, n° 20, supplément au n° 21, 26, 37 des 2, 16, 1er, 6., 13., 20.2., 19.3., 2., 9., 23., 30.4., 14., 21.5., 25.6., 10.9.1836 ; n° 23, supplément au n° 28, n° 32, des 10 et 24.6., 15.7., 12.8.1837 ; supplément au n° 9, du 27.2.1848, n° 49, 50, 51 des 3., 10., 17.12.1848 ; n° 34, 26.8.184 9; n° 35 et 37, des 2 et 16.9.1849 ; n° 5, 33, 44, 48, 49, 50 des 3.2., 18.8., 3.11., 1er., 8, 15.12.1850 ; n° 50, 14.12.1851 ; n° 105, 31.12.1854 ; n° 1, 5, 12, 38, 96 des 3 et 17.1er., 11.2., 13.5. et 2.12.1858 ; n° 1, 1er.1.1859 ; n° 87, 29.10.1863 ; n° 29, 10.4.1864 ; n° 21,12.3.1865 ; n° 78, 30.9.1866 ; n° 109, 114, des 15 et 26.9.1867 ; RA, 1836, L. Levrault, Esquisses du Haut-Rhin, p. 23-49 ; Klenck, La Parfaite Harmonie 1809-1865, Mulhouse, 1865 (p. 74-75) ; Histoire documentaire de l’industrie de Mulhouse, 1902, p. 707, 711, 721 ; P. Leuilliot, La presse et l’Histoire. Notes sur l’Industriel Alsacien (1835-1870), BMHM, 1. LXVIII, 1960, p. 103, 104, 106, 107-108, 109 ; P. Leuilliot, Il y a cent ans Mulhouse en 1865, Bulletin du Musée historique de Mulhouse, t. LXXIII, 1965, p. 86, 97-98 ; P. Leuilliot. Il y a cent ans Mulhouse en 1866, Bulletin du Musée historique de Mulhouse, t. LXXIV, 1966, p. 130-131 ; F. Ott, La société industrielle de Mulhouse, 1999, p. 649, cite Baret comme membre de la SIM, ce qui est erroné, de même l’affirmation (p. 664) selon laquelle l’impression du bulletin de la SIM fut confiée à partir du 1.1.1841, à Thinus et Baret (association dissoute en 1837).

Patrick Madenspacher (2007)