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BALDUNG dit Grien (ou Grien dit Baldung) Hans (Johannes, Grienhans)

 

Peintre (C puis Pl ?). (★ 1484/85 à Schwäbisch-Gmünd (Gamundianus, inscription de lui sur le maître-autel de la cathédrale de Freiburg i. Br., pouvant cependant à la rigueur se traduire par « d’une famille originaire de Schw.-Gmünd ») ou à Weyersheim (zum hohen Turm) au nord de Strasbourg (d’après la chronique du peintre strasbourgeois © Sebald Büheler, acquéreur de l’héritage de Baldung Grien, rédigée 1586/88, pas toujours exempte d’erreurs, brûlée en 1870, mais citée par © Schoepflin, © Grandidier, © Strobel, © Schneegans, etc ; † sept. 1545 à Strasbourg). Frère (aîné ?) de © Caspar Baldung (voir la question de leurs parents éventuels au précédent article). ∞ très probablement à Strasbourg, avant 31.10.1510 Margaretha Herlin († 10.8.1552), fille d’Arbogast Herlin († 1506/07), nièce de l’ammeister © Martin Herlin († 1547) et sœur de © Christmann (Christian) Herlin († 1562), le futur professeur de mathématiques à la Haute École de Strasbourg et chanoine protestant de Saint-Pierre-le-Jeune.

D’après les récentes études de Tilman Falk, analysant l’autoportrait conservé à Bâle, Hans Baldung Grien pourrait avoir fait son apprentissage en Souabe. À partir de 1503 au plus tard, année que portent ses premiers travaux datés, il est comme compagnon à Nürnberg dans l’atelier de Dürer, dont l’influence se manifeste dans ses dessins, bois isolés et illustrations pour livres imprimés, en même temps que commence à s’affirmer son style propre. En 1507 probablement il se rend peut-être à Halle et peint pour l’archevêque de Magdeburg-Halle le retable des Rois Mages et celui de saint Sébastien. De là il vient s’établir à Strasbourg, où il acquiert le droit de bourgeoisie le 17.4.1509 et se marie, nouant des relations profitables avec les margraves de Bade, des nobles et des patriciens, en particulier avec la commanderie de Saint-Jean de l’Ile Verte à Strasbourg, où il esquisse le portrait de Maximilien Ier et pour laquelle il peint le tableau de la messe de Saint-Grégoire. A côté d’autres tableaux, il publie des feuilles volantes gravées représentant des sujets bibliques et hagiographiques, ainsi que des sorcières, et illustre aussi des livres comme le Dyl Ulenspiegel, le Buch Granatapfel de © Geiler et le Hortulus animae. – Au cours de 1512 il se fixe pour cinq ans à Freiburg i. Br., où grâce peut-être à ses relations de famille il a obtenu la commande du maître-autel de la cathédrale, qu’il termine en 1516 et que l’on considère comme son chef-d’œuvre. Il y déploie une activité intense et peint encore d’autres tableaux et portraits, participe à l’illustration du livre d’heures de Maximilien Ier, dessine des esquisses pour vitraux, des bois isolés (scènes de la Passion, saint Sébastien, Adam et Ève) et illustre des livres comme les Zehen Gebot de Marcus Weida. En 1518 il rentre à Strasbourg, où il a racheté le droit de bourgeoisie le 5.5.1517 et où il reste jusqu’à sa mort. Au plus tard en 1533 il devient échevin de sa corporation de l’Échasse et en 1545 membre du Grand Sénat de la Ville.
Sa production continue à rester abondante et ne semble faiblir que lentement : elle comprend à la fois des tableaux (portraits, sujets bibliques et d’histoire romaine, thèmes profanes et allégoriques, le dernier retable étant de 1522), des dessins (mêmes catégories et vues topographiques), des esquisses pour vitraux, des planches gravées, bibliques ou autres, isolées, comme l’écuyer ensorcelé, ou en suites, comme les chevaux sauvages, ou encore destinées à des livres imprimés, tels des écrits de Hutten et de Luther, des ouvrages de musique, des œuvres de © Brunfels, de © Hédion, les planches anatomiques d’un traité de © Walter Ryff. Observateur aigu de la réalité, Baldung sait la rendre d’un trait assuré, réduit à l’essentiel. Il est en même temps doué d’une puissance d’imagination sans cesse à la recherche de nouvelles façons de représenter les thèmes qui lui sont chers : Nativité, Vierge à l’enfant, Adam et Ève, la femme et la mort, les sorcières, Vénus et autres nus féminins allégoriques, Hercule et Antée, chevaux sauvages et domestiqués. Son inlassable curiosité le fait s’intéresser aux sujets les plus divers et s’attaquer en particulier aux problèmes d’ordre psychologique, voire psychanalytique ; d’où ses portraits si parlants, d’où ses variations sur le thème du péché originel, sur la représentation de la vitalité humaine et animale et sur celle des passions, sur la fragilité de la beauté féminine si envoûtante pour lui ; d’où sa modernité en ce domaine, mais aussi la difficulté d’interpréter nombre de ses tableaux et les explications divergentes que l’on n’a pas fini d’en donner. Quelle était sa religion, sinon sa philosophie : foncièrement chrétienne ou teintée d’épicurisme, ou les deux à la fois ? En tout cas son enthousiasme pour Luther et Hutten en 1520/21, partagé alors par presque tout le mouvement humaniste, semble n’avoir été que passager, et sa collaboration à l’illustration d’œuvres catéchétiques protestantes autour de 1540 peut fort bien s’expliquer à partir d’une base bibliciste commune. Toujours est-il que sa situation de fortune aisée, sa culture humaniste, sa forte personnalité artistique, ses relations avec les milieux de la haute société, en partie restés catholiques, en partie enclins vers un épicurisme bon enfant, en partie dotés d’un large horizon intellectuel, lui permettent de surmonter les crises d’iconoclasme des années 1524/25 et 1529/30, consécutives à l’établissement du protestantisme à Strasbourg, et de ne pas être victime de la raréfaction des commandes d’art religieux qui frappe si durement ses confrères peintres et sculpteurs. Ses recherches d’ordre pictural et physionomique amènent d’ailleurs pendant cette seconde période strasbourgeoise un changement de son style, une accentuation du caractère pathétique de son art, un rôle moindre de la couleur qui ne se réaffirmera que vers le milieu des années trente, un certain maniérisme recherchant le typique sous les traits de l’individu. Malgré les nombreux problèmes que Baldung continue à poser aux chercheurs et dont beaucoup ne pourront probablement pas être résolus faute de documents, il reste l’un des tout grands noms de l’histoire de la peinture dans l’Empire pendant la première moitié du XVIe siècle.

Actes le concernant: Freiburg i. Br., Stadtarchiv; Archives municipales de Strasbourg, etc.; signalés par Mela Escherich, Hans Baldung-Grien Bibliographie 1509-1915, Strassburg, 1916; publiés en partie dans Hans Rott, Quellen und Forschungen zur südwestdeutschen und schweizerischen Kunstgeschichte. III : Oberrhein 1, 1936, p. 107 et 217-219; en cours d’édition dans Gert Von der Osten, Hans Baldung Grien Gemälde und Dokumente. Berlin. Dr. Verl. f. Kunstwissenschaft. 1983, in f°, 345 p., 208 pl., ill.

Bibliographies générales: jusqu’en 1915, M. Escherich, op. cit.; 1916-1958, avec reprise des titres essentiels antérieurs, Staatliche Kunsthalle Karlsruhe. Hans Baldung-Grien Ausstellung, Karlsruhe, 1959, p. 27-32; 1959-1977; Hans Baldung Grien, Das graphische Werk. Vollständiger Bildkatalog der Einzelholzschnitte, Buchillustrationen und Kupferstiche, bearb. v. Matthias Mende, Unterschneidheim, 1978, p. 25-38; en cours de complément dans G. Von der Osten, H. B. Grien Gemälde, op. cit.

Bibliographie courante: Répertoire d’art et d’archéologie; Bibliographie alsacienne; Württembergische Bibliographie. Bibliographie choisie: Carl Koch, Baldung-Grien, Hans, Neue Deutsche Biographie, I, 1953, p. 557-558; Hans Baldung Grien, Handzeichnungen, Druckgraphik, hsg. v. Marianne Bernhard, München, 1978, p. 83-86.

Œuvre: on a encore de lui une centaine de tableaux, environ 250 dessins, dont une centaine dans le « Skizzenbuch » de Karlsruhe, plus de 80 bois gravés isolés et près de 500 gravures sur bois de tous formats pour des livres imprimés. – Catalogues d’ensemble: Carl Koch, Katalog der erhaltenen Gemälde, der Einblattholzschnitte und illustrierten Bücher von Hans Baldung-Grien, Kunstchronik, 6 (1953), p. 297-302; Staatl. Kunsthalle Karlsruhe… Ausstellung, op. cit., 1959, par Jan Lauts etc. – Dessins: Carl Koch, Die Zeichnungen Hans Baldung-Griens, Berlin, 1941; (un article de Gert von der Osten, donnant des additions et corrections est en préparation); un large extrait de l’éd. Koch a été donné en 1978 par M. Bernhard, Hans Baldung-Grien, Handzeichnungen, op. cit.; le « Karlsruher Skizzenbuch » a été republié par Kurt Martin, 2. erg. Aufl., Basel, 1959.

Gravures: voir ci-dessus les publications de Mende et de Bernhard de 1978; pour l’illustration des livres voir aussi Maria Consuelo Oldenbourg, Die Buchholzschnitte des Hans Baldung Grien. Ein bibliographisches Verzeichnis ihrer Verwendungen, Baden-Baden, Strasbourg, 1962.

Tableaux: l’édition de G. v. Térey, Die Gemälde des Hans Baldung genannt Grien, Strassburg, 1896-1900, 2 vol., depuis longtemps dépassée, est en train d’être remplacée par celle de G. von der Osten, H. Baldung Grien, Gemälde, op. cit.; pour les années à partir de 1517/18 voir déjà la liste dans Georg Bussmann, Manierismus im Spätwerk Hans Baldung Griens. Die Gemälde der zweiten Straβburger Zeit, Heidelberg, 1966, p. 181-188. 

Etudes d’ensemble: H. Curjel, Hans Baldung Grien, München, 1923; Otto Fischer, Hans Baldung Grien, München, 1939; Carl Koch, Hans Baldung-Grien 1484/5-1545, Die grossen Deutschen, I, Berlin, 1955, p. 401-417, repris en tête de… Karlruhe… Ausstellung, op. cit., 1959, p. 15-26.

Travaux spéciaux: Carl Koch, « Hans Baldungs Geburtsjahr, » Zeitschr. f. Kunstgesch., 2 (1933), p. 34-39; Thomas A. Brady, Jr., « The social place of a German Renaissance Artist: Hans Baldung Grien (1484/85-1545) at Strasbourg », Central European History, 8 (1975), p. 295-315; Karl Oettinger und Karl-Adolf Knappe, Hans Baldung Grien und Albrecht Durer in Nürnberg, Nürnberg, 1963. Helmut Perseke, Hans Baldungs Schaffen in Freiburg, Freiburg i. Br., 1941. Pour la seconde période strasbourgeoise, G. Bussmann, op. cit. – Parmi les publications toutes récentes: Gert von der Osten, « Ein Altar des Hans Baldung-Grien aus dem Jahre 1511 – und eine Frage nach verschollenen Werken des Malers », Zeitschr. d. Deutschen Ver. f. Kunstwissenschaft, 31 (1977), p. 51-66; Hans Baldung-Grien im Kunstmuseum Basel, Basel, 1978 et les articles publiés à l’occasion de cette exposition dans Zeitschr. f. schweizerische Archäologie und Kunstgeschichte, 35 (1978), p. 205-275; Jean Wirth, La jeune fille et la mort, Genève, 1979; l’article du même et celui de François-Georges Pariset, dans Croyants et sceptiques au XVIe siècle; Le dossier des « Épicuriens », Strasbourg, 1981, p. 121-138; F.-G. Pariset, » Réflexions à propos de Hans Baldung Grien », Gazette des Beaux-Arts, 94 (1979), p. 1-8; A. Chatelet, « À propos de Baldung-Grien », Cahiers alsaciens d’archéologie, d’art et d’histoire, 24 (1981), p. 186-190; H. Baldung-Grien, Prints and Drawings (exposition à la National Gallery of Art de Washington et à la Yale University Art Gallery), 1981 (par J. H. Marrow, A. Shestack, C. K. Talbot & L. C. Hults). Ch. A. Mesenzeva, « Der behexte Stallknecht des Hans Baldung Grien », Zeitschrift für Kunstgeschichte, 44 (1981), p. 57-61; G. von der Osten, « Über die Schwierigkeit eine datierte « Renaissance » Madonna zeitlich anzusetzen », Ars auro prior. Studia loanni Bialostoci sexagenario dicata, Warszawa, 1981, p. 307-312.

(Auto) portraits: vers 1502 (à Bâle), 1507 (Martyre de saint Sébastien à Nuremberg), 1516 (crucifixion du maître-autel de Fribourg en Br. ), 1534 (dessin à Paris; grav. parue dans I’Epicedion Sporeri).

Jean Rott, revu par Gert von der Osten (1983)