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REIBER Auguste Ferdinand, dit COLEO

Entomologiste, (Pl) ( Strasbourg 16.9.1849 | Strasbourg 14.8.1892).

Fils d’Auguste Ferdinand Reiber, négociant, et d’Emma Ott. Célibataire. Après des études secondaires au Gymnase protestant de Strasbourg, Reiber entra dans l’entreprise paternelle de commerce du houblon, tout en consacrant la totalité de ses loisirs à l’étude des insectes du groupe des coléoptères et à celle de l’histoire locale, ce qui le fit rapidement connaître, tant dans le milieu des entomologistes que parmi ceux qu’intéressaient l’histoire et l’archéologie de l’Alsace. Ses publications scientifiques témoignent d’une vaste et solide culture qu’il acquit en autodidacte et d’un grand amour de la nature, tandis que ses productions littéraires très variées, dans lesquelles il laissa libre cours à son esprit de dilettante, sont habituellement émaillées de traits d’humour et de propos volontiers gaulois. Les études gambrinales, qui constituèrent son œuvre archéologique capitale relative à l’origine et a l’histoire de la bière, furent souvent mises en parallèle avec L’ancienne Alsace à table de Charles Gérard. Se succédèrent, en alternance avec ses publications entomologiques, diverses productions humoristiques et satiriques, dont certaines écrites en dialecte local. Sa prédilection pour un site des bords de l’Ill aux portes de Strasbourg où il était propriétaire d’un îlot auquel il donna le nom d’île Coléo, son pseudonyme littéraire (l’actuelle île Gutenberg), fut à l’origine d’un de ses ouvrages de luxe consacré à la Montagne Verte que d’aucuns qualifièrent d’amusant paradoxe archéologique. Il chercha en effet à établir que Jean Gutenberg fit dans la première moitié du XVe siècle son invention de l’imprimerie sur cette île que Reiber légua par testament à la ville de Strasbourg, à charge pour celle-ci d’y ériger une stèle commémorative devant laquelle par la suite les « typo s» strasbourgeois se rencontrèrent tous les ans à la Saint-Jean. À mettre encore au compte de l’intérêt que Reiber témoigna envers le passé de sa ville natale, son bel album sur les armes de la ville de Strasbourg dont il passa en revue les phases héraldiques successives et ses portraits biographiques d’artistes alsaciens où, par une analyse très fine, il sut caractériser chacun de ses personnages. Son dernier travail littéraire fut une étude préliminaire parue peu avant sa mort à l’occasion du centenaire de la Marseillaise sous forme d’une plaquette, tirage à part du Journal d’Alsace du 25 avril 1892, qui devait mettre en pleine lumière la genèse de ce qui fut d’abord le Chant de guerre pour l’Armée du Rhin. Les écrits scientifiques de Reiber sont à placer, autant par leur variété que par leur intérêt, au même niveau que ses productions littéraires. Il s’y révéla à la fois comme un observateur perspicace de la faune régionale et comme un naturaliste dont l’esprit critique ne se démentit dans aucune de ses publications. Il n’avait pas 24 ans lorsque parut son étude sur les insectes de la promenade Le Nôtre, suivie par la zoologie de la cathédrale de Strasbourg et son inventaire des lépidoptères capturés en abondance, notamment les nocturnes, autour des lampadaires de la gare. Il réalisa, en collaboration avec le docteur A. Puton de Remiremont, un volumineux catalogue des Hémiptères hétéroptères et homoptères de l’Alsace et de la Lorraine. Ce fut ensuite sa première étude de fond des coléoptères, ses insectes de prédilection, dont il signala des espèces non encore connues de la faune d’Alsace et des Vosges. Sa promenade entomologique à l’île du Rhin, près de Strasbourg, révéla non seulement sa vaste connaissance des nombreux ordres formant la classe des insectes, mais devait aussi être pour ses lecteurs une invitation à goûter la beauté de ce site agreste qu’il décrivit en amoureux inconditionnel de la nature. Une publication importante qui ne compte pas moins de 50 pages fut consacrée aux progrès que connurent au fil des temps les sciences naturelles en Alsace et dans les régions limitrophes. Il s’agit en fait d’un vaste panorama de la situation passée et actuelle (au XIXe siècle) de l’entomologie. Dans l’introduction Reiber rappelle les noms de deux précurseurs, Léonard Baldner © et Jean Baptiste Walther ©, observateurs scrupuleux et illustrateurs de grand talent, et celui du professeur Jean Hermann © qui, à la fin du XVIIIe siècle fut, selon ses termes, « le père des naturalistes alsaciens ». Suit alors une analyse critique des travaux et des mérites de leurs continuateurs dans le domaine de l’entomologie, qu’ils aient été professionnels, représentants de l’enseignement, attachés à un musée, ou simples amateurs. À ce titre, la publication de Reiber conserve toute sa valeur, car elle brosse un tableau de la grande époque consacrée à l’inventaire de la faune d’insectes dont les collectionneurs alignaient scrupuleusement, comme lui-même, les spécimens dans leurs boîtes. La dernière grande œuvre de Reiber reste la traduction française, largement commentée, du texte original du Vogel-, Fisch- und Thierbuch (1666) de Léonard Baldner déjà cité. Reiber eut le mérite de tirer de l’oubli ce naturaliste. Dans cette publication de 114 pages est donnée non seulement la biographie de ce spécialiste de la faune aquatique alsacienne du XVIIe siècle, mais aussi la bibliographie de son œuvre manuscrite reproduite en quelques exemplaires seulement parmi lesquels figurait celui de la Bibliothèque de Strasbourg incendiée durant le siège de la ville en 1870, et enfin une description critique des espèces rencontrées, oiseaux et poissons essentiellement. À noter que les représentations en couleur d’une grande fidélité sont à nouveau accessibles depuis 1973 grâce à la réédition en fac-similé de l’exemplaire conservé à Cassel en Hesse. Reiber fut, tout au long de sa brève existence, un grand collectionneur d’alsatiques et un bibliophile averti dont, après son décès, les trésors en gravures, estampes et précieux volumes, répertoriés dans le Catalogue de la collection d’alsatiques, pages VII à XXI, par son contemporain et ami Rodolphe Reuss ©, furent, selon la volonté du défunt, dispersés lors d’une vente publique le 11 mai 1896.

Les insectes de la Promenade Lenôtre, Colmar, 1874; Coléoptères nouveaux ou rares pour l’Alsace et les Vosges, Colmar, 1874; E klaan’s Andenke an de 23. un 24. Mai 1876 ; Arawisches Klauelied, Strasbourg, 1876, avec vignettes et une carte géogr. ; Chronique du cercle vicieux de Strasbourg, Strasbourg, 1876 ; Inwejung von der Insel Coleo, Strasbourg, 1877 ; Montagne-Verte, Strasbourg, 1877, gr. in-4°, avec 13 pl. à l’eau-forte, bois anciens ; Promenade entomologique à l’Île du Rhin, près de StrasbourgColmar, 1878 ; Les régions entomologiques de l’Alsace et de la chaîne des Vosges, Colmar, 1878 ; Les armes de la ville de Strasbourg, 1878, gr. in-4°, 20 pl. à l’eau forte, en collab. avec P. Reiber et Ch. Streisguth ; D’Fischer von Strossburry, Strasbourg, 1879, paru dans le Mirliton, feuille satirique illustrée ; Catalogue des Hémiptères-Hétéroptères d’Alsace et de la Lorraine, Colmar, 1876, et Catalogue des Hémiptères-Homoptères de l’Alsace, Colmar, 1880, en collaboration avec A. Puton ; Coléoptères nouveaux ou intéressants de l’Alsace et des Vosges, Colmar, 1880 ; Lépidoptères pris à Strasbourg, Colmar, 1882 ; Note sur la zoologie de la cathédrale, Colmar, 1882 ; Etudes gambrinales, Paris, Nancy, 1882 ; Portraits et biographies d’artistes alsaciens, Strasbourg, 1883,14 pl. avec texte in-folio ; Aperçu des progrès de l’entomologie en Alsace et notes sur les collections et les collectionneurs d’insectes de cette province, Colmar, 1885 ; L’histoire naturelle des eaux strasbourgeoises de Léonard Baldner (1666), Colmar, 1888. Les écrits de Reiber cités avec la référence « Colmar » ont été publiés dans le Bulletin de la Société d’histoire naturelle de Colmar dont il était membre.

Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, t. 2, 1910, 518-519 ; L. Sittler, Hommes illustres d’Alsace, Wettolsheim, 1976 ; Encyclopédie de l’Alsace, X, 1985, p. 6294.

François Schaller (1997)